Les bombardements du 3 mars 1944 à Andrésy
La ville d’Andrésy est occupée par des troupes en cantonnement pendant quatre à cinq mois entre 1940 et 1944. Le registre des délibérations du conseil municipal affirme que, durant les années d’occupation, la vie des habitants est calme et paisible. Pourtant, la commune connaît plusieurs bombardements en 1944, notamment celui du 3 mars qui est particulièrement meurtrier.

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L’alerte est donnée vers 3h15 du matin mais ne permet pas à tous les habitants d’évacuer rapidement. Vers 3h30, un appareil de l'aviation alliée, paraissant s’être détaché du groupe, vient survoler le quartier de Denouval où, après plusieurs circonvolutions, il laisse tomber neuf bombes sur un groupe de maisons d’habitation, le tout dans un rayon de 60 m.
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A partir de 4h30, les secours commencent à arriver : la Défense Passive de Poissy, de Carrières-sous-Poissy et de Conflans-Sainte-Honorine, les sections de Croix-Rouge d’Andrésy et de Poissy avec leurs ambulances, les Compagnies de sapeurs-pompiers de Conflans et de Chanteloup et les services des Ponts-et-Chaussées. André Braouézec, alors sous-lieutenant des sapeurs-pompiers d’Andrésy, écrit dans son rapport du 4 mars : « A notre arrivée sur les lieux du sinistre, les Allemands cantonnés à proximité, les voisins valides et quelques hommes de la Défense passive, avaient commencé le dégagement des victimes […]. Les recherches s’opérèrent sur douze points différents et malgré la précarité des moyens d’éclairage nous avions retiré des décombres au petit jour la presque totalité des victimes. »
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A 7h40, le bilan est lourd : douze bâtiments ont été touchés et trente-trois victimes se trouvent sous les décombres. Vingt-et-une personnes sont dégagées vivantes et trois individus blessés sont rapidement transférés à l’hôpital de Saint-Germain. Au total, les autorités dénombrent douze victimes dont l’une sera découverte au bord d’un trou de bombe, à l’arrière des bâtiments sinistrés.
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Nom Prénom Date de naissance (âge) Profession Adresse Dumas (veuve Merlin) Suzanne 20 novembre 1897 (46 ans) Sans profession 131 Grande Rue Coulon Alfred Paul 14 février 1875 (69 ans) Cultivateur 135 Grande Rue Villeneuve (épouse Coulon) Marie Juliette 22 janvier 1880 (64 ans) Cultivatrice 135 Grande Rue Vauclin Jacqueline Marie Juliette 17 juin 1926 (17 ans) Sans profession 137 Grande Rue Desurvire (veuve Demarine) Albertine Gabrielle 16 juillet 1888 (55 ans) Cultivatrice 138 Grande Rue Demarine André Henri 11 juin 1910 (33 ans) Cultivateur 138 Grande Rue Fonteneau Jeannine Louise Marie 23 mai 1927 (16 ans) Sténo-dactylographe 139 Grande Rue Quennet René Roger 14 novembre 1921 (22 ans) Cultivateur 140 Grande Rue Pinaudier (épouse Herbaut) Camille Lucienne 27 octobre 1914 (29 ans) Sans profession 142 Grande Rue Herbaut Huguette 23 février 1934 (10 ans) Sans profession 142 Grande Rue Herbaut Odette Marcelle 13 mars 1939 (4 ans) Sans profession 142 Grande Rue Herbaut Bernard Louis 7 octobre 1942 (1 an) Sans profession 142 Grande Rue -
Les dépouilles sont entreposées dans la grande salle de la mairie où la toilette funéraire est assurée par les infirmières et en particulier par une certaine Madame Andrieu, âgée de 77 ans. Les corps sont progressivement mis en bière, au fur et à mesure de leur identification. Alfred Coulon ne sera reconnu par son fils Paul Coulon, à Carrières-sous-Poissy, qu’en fin de journée. Le 6 mars 1944, les cadavres sont transportés dès les premières heures de la matinée à l’église paroissiale afin qu’un hommage national leur soit rendu.
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Le service funèbre est célébré à 10h par l’abbé Nief et présidé par Monseigneur Audrain, évêque auxiliaire de Versailles. Chaque cercueil est orné d’une gerbe de fleurs commandée par la mairie tandis que des couronnes sont déposées au nom du Maréchal Pétain, chef de l’Etat, de Monsieur Cathala, Ministre-Secrétaire d’Etat aux Finances, et de Monsieur Revilliod, Préfet de Seine-et-Oise. Afin d’honorer leur mémoire, les douze victimes obtiennent la mention « Mort pour la France », apposée sur leur acte de décès. Comme le souligne le compte rendu de la séance extraordinaire du 4 mars 1944, « l’hommage aux morts rendu, il convenait de s’occuper des rescapés. »
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De nombreuses familles sinistrées sont relogées et des collectes de fonds sont organisées pour leur venir en aide, comme en témoignent les dons issus de structures publiques (mairie de Villennes-sur-Seine) et privées (société Pierre Marest).
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A partir du 25 mai 1944, Andrésy, et en particulier le quartier Fin d’Oise, est la cible de nouveaux bombardements destinés à détruire certains axes de communication. Le 27 août, la ville est évacuée, entraînant un déplacement de la population vers Maurecourt. Le lendemain, les Allemands quittent la commune. Les membres du groupe de Résistance arrivent au moment où les cloches commencent à annoncer la libération. Ils prennent l’Hôtel de Ville et désavouent, dans la foulée, le Maire Auguste Bocquillon. A la municipalité sortante est substitué le comité local de résistance dont la présidence est assurée par Georges Pelé. Le premier conseil est immédiatement ouvert mais est perturbé quelques heures plus tard par l’arrivée des Américains : « A cet instant, il est signalé au comité que les premières voitures américaines arrivent à Andrésy, et en conséquence, la séance est aussitôt levée pour se porter au-devant des Américains. Il est 17 heures 02. Effectivement, les membres du comité en sortant de la mairie aperçoivent à la hauteur de la Poste quatre voitures américaines […]. Malgré l’ovation de la foule, et malgré le mauvais temps, les voitures ne s’arrêtèrent pas et continuèrent en direction de Maurecourt, au milieu des hourras de la population. »